Pétrolegate/ Procès en appel : Le verdict attendu le 14 avril prochain

 La Cour d’appel de Lomé s’est penchée  sur l’affaire des révélations du journal  L’Alternative sur un supposé détournement de fonds publics par des membres du CSFPPP,  au cours d’une audience tenue le 10 mars.  Après donc  les plaidoiries, la Cour d’appel de Lomé avait renvoyé le délibéré sur le 14 avril prochain. La semaine prochaine donc, les protagonistes du dossier Petrolegate pourront connaitre la décision de la Cour d’Appel à propos du procès en appel du jugement rendu en novembre 2020 par le tribunal de première instance de Lomé sur ladite affaire.      

Il ne reste que quelques jours pour connaitre la vérité sur cette affaire de détournement de centaine de milliards dans la commande du pétrole au Togo. Le 14 avril prochain, sauf changement de dernière heure, le procès en appel pourra connaitre son épilogue. C’est d’ailleurs le souhait des mis en cause dans la fameuse affaire dite Pétrolegate. Ceux-ci verront leur honneur rétabli, tout comme ce fut le cas lors du jugement de l’affaire en première instance le 04 novembre 2020.

A l’audience du 10 mars dernier à la Cour d’Appel de Lomé,  les prévenus se sont encore démenés à convaincre les juges,  en brandissant le fameux rapport provisoire d’audit. C’était sans compter avec la dextérité et le professionnalisme des avocats des mis en cause. Ces derniers ont littéralement botté en touche ce document qui non seulement manque de fiabilité mais en plus ne saurait être utilisé pour justifier des allégations publiées antérieurement. 

Il sied de rappeler brièvement que les textes fondamentaux du journalisme recommandent au journaliste la publication des informations dont la source, la véracité et l’exactitude sont établies. Autrement, les accusations sans preuves sont des fautes professionnelles graves et constituent des pratiques contraires à la déontologie du journalisme. Si l’on se fie aux recommandations sus évoquées, il va sans dire que le journal L’Alternative devrait disposer de preuves  des  allégations publiées dans ses colonnes  et qui  accusent la famille Adjakly de détournement de près de 500 milliards.

 Malheureusement, tel ne semble le cas au regard des plaidoiries des avocats des prévenus à l’audience du 10  mars dernier. Le conseil du confrère s’est encore accroché au rapport provisoire d’audit, un document que des officiels du pays ont mis en doute du fait des circonstances et démarches viciées dans lesquelles ledit document a été élaboré. D’ailleurs, en droit,  il n’est pas bienséant de   rechercher l’exactitude et la véracité des faits publiés dans les démarches postérieures entreprises par de tierces personnes. Cela frise le ridicule.

C’est malheureusement la posture qu’adopte le camp en face des accusés dans ce dossier. Cela rappelle l’angle pitoyable de défense adopté par le conseil des prévenus lors du jugement de l’affaire en première instance.  Le verdict du jugement  avait regretté cette attitude qui consistait à s’abriter derrière des procédures postérieures à la publication des allégations  pour faire ressortir les preuves. Ainsi,   le confrère  a été reconnu coupable de publication d’accusations sans preuves, c’est-à-dire sans fondement comme le clame la partie civile. Car le rapport d’audit de l’Inspection Générale des Finances ne saurait être reconnu comme une preuve des publications du confrère.

Comme nous le soulignions dans les précédentes publications,  le ministre Trimua, avait aussi laissé entendre,  en réaction à ce rapport provisoire d’audit à charge,   qu’à l’étape des conclusions fournies par l’équipe des auditeurs, il n’était pas question pour le gouvernement d’en tenir compte, car, les bases de l’audit sont faussées. Selon le ministre, le document d’audit souffrait de crédibilité. C’était donc un rapport dont  « il faut faire extrêmement attention à ne pas donner de la polémique inutile et qui amène à ces éléments de procès que nous avons avec l’accusation des personnalités et des individus sur un certain nombre d’éléments qui ne sont pas fiables. Ce rapport qui est brandi comme une preuve aujourd’hui par les uns et les autres à charge d’un certain nombre de personnalités n’est pas fiable. Il n’a pas été fait dans les conditions acceptables, et naturellement, le gouvernement n’en tirera aucune conclusion à l’étape actuelle », avait indiqué le ministre Trimua. Généralement,  « le gouvernement a traditionnellement l’habitude de commanditer ce qu’on appelle une réconciliation des données pour pouvoir rapprocher les chiffres.  Le gouvernement n’a pas commandé d’audit sur le secteur pétrolier… », avait martelé le ministre.

Du coté des accusés dans l’affaire, le travail des auditeurs est  aussi remis en cause. Dans un document de 62 pages en guise d’observations sur ce rapport provisoire d’audit , les accusés dans cette affaire ont fait savoir qu’ « avant tout développement au fond sur les différents chapitres traités par les auditeurs, nous  ne  pouvons  dissimuler  notre  surprise ainsi que notre dépit, face à la partialité délibérée qui a marqué l’exécution de la mission à  notre  égard,  qui  l’a  amené  à  afficher  une hostilité  caractérisée  dans  ses  analyses  et conclusions  chaque  fois  que  celles-ci  nous ont  visés  « , mentionnent-ils  dans le document          

Plus loin, on peut lire  » le climat qui a prévalu tout au long de la mission induit, de notre part, un doute quant aux  véritables  finalités  de  l’audit,  dont  les conclusions  nous  portent  à  croire,  qu’il  n’a été commandité que dans le but  d’accabler  les  ADJAKLY,  et trouver  matière  à  corroborer  les  allégations infamantes dont la rumeur publique a entaché  leur  nom,  depuis  les  publications  scandaleuses parues dans certains journaux de la place.   Outre   les   réponses   aux   diverses recommandations  nous  indexant  personnellement, nous souhaitons apporter des observations  générales  sur  le  déroulement  de  la mission et le contenu de ce rapport dans son ensemble « .

Le conseil de la Famille Adjakly avait aussi qualifié les accusations du confrère de dopage médiatique. « C’est du fake news à la puissance giga », avait indiqué Me Sossa lors d’une intervention sur l’affaire sur une chaine internationale.

Voici quelques  observations

8.      Livraison des produits pétroliers (page 16, paragraphe 4.1.3) Capacités de stockage

LXXI. Nous observons qu’à l’issue de leur mission, les auditeurs ont constaté que, quel que soit le gagnant de l’appel d’offres, celui-ci devra effectuer plusieurs livraisons sur la période du contrat, mais surtout il devra « prendre contact avec la STSL pour les formalités de livraison des produits (demande de creux [c’est-à-dire demande de capacité de stockage disponible], nomination des bateaux, acceptation des bateaux etc.) ». Les auditeurs ont aussi pu constater au cours de leur mission que “selon les disponibilités des bacs de la STSL, la livraison se fait souvent en un nombre plus élevé de lots que prévu”. Il résulte de ces constatations des auditeurs que ce n’est pas le CSFPPP ni les sociétés d’intermédiation qui sont responsables du calendrier des livraisons des produits pétroliers au Togo13, contrairement aux allégations du journal L’Alternative dans sa parution du 9 juin 2020.14

LXXII.  Les auditeurs n’estiment que l’étalement des livraisons dans le temps “ouvre  la porte à des éventuelles dérives”. Nous invitons les auditeurs à préciser les “éventuelles dérives” qu’ils évoquent afin que, si ces dérives existent, des remèdes y soient apportés. En l’espèce l’étalement des livraisons à une conséquence financière (voir infra à propos des surestaries et coûts logistiques) auxquelles il ne sera pas possible de remédier tant que la STSL ne sera pas en mesure de prendre livraison des produits commandés en une ou deux fois comme cela est censé être le cas compte tenu des capacités théoriques de stockage de la STSL.

LXXIII. Nous regrettons que les auditeurs n’aient pas partagé avec le CSFPPP les données sur les capacités réelles de stockage de la STSL. Nous regrettons également que la seule personne interrogée à la STSL soit sa Directrice Générale. On aurait pu s’attendre, par souci de cohérence et de parallélisme, à ce que les auditeurs interrogent les personnes occupant des fonctions similaires à celles interrogées à la STE (chef section affaires financières, CTR, chef dépôt, responsable stock15).

LXXIV. La recommandation n°9 invitant le Gouvernement togolais à investir dans la construction de nouveaux bacs est superflue dans la mesure où elle figure déjà dans le PND (page 38)16.

 Sociétés d’intermédiation

LXXV. Dans le cadre de leur mission d’intermédiation,  MH et  TPC ont toujours été mandatées par les fournisseurs pour gérer les paiements des marketers et les transferts des produits de leurs ventes vers leurs comptes à l’étranger.

LXXVI. Contrairement à leur prédécesseur (LAYCON), MH et TPC n’ont jamais été rémunérées, directement ou indirectement, par des fonds publics : elles sont rémunérées exclusivement par les traders.

LXXVII. S’agissant de missions effectuées pour le compte des fournisseurs et sur mandats des fournisseurs, il n’entre pas dans les compétences du président du CSFPPP de se substituer aux sociétés d’intermédiation ni d’imposer aux fournisseurs le choix de leur mandataire.

LXXVIII. La recommandation n°10 invitant le CSFPPP à reprendre toute l’activité de la commande, de l’approvisionnement jusqu’au paiement, est inappropriée.

9.      Situation des surfacturations (page 18, paragraphe 4.1.5.1 )

LXXIX. L’analyse du « Tableau de justifications des surfacturations » fourni par les auditeurs fait apparaître plusieurs erreurs matérielles commises par les auditeurs :

–        Ligne 2 (N° facture S1528863), la quantité « 5197,111 » est inexacte car elle ne correspond pas au montant figurant sur le document source (facture VITOL du 20/11/2015 : la bonne quantité est 5197,511) ;

–        Ligne 2 (N° facture S1528863), colonne « facture redressée » : le « montant en USD » de la colonne « facture redressée » n’est pas égal au produit des colonnes « Q » et « PU » indiqués dans le tableau ;

–        Ligne 2 (N° facture S1528863), le tableau indique un « PU » unique alors que le document source (facture VITOL du 20/11/2015) indique deux (2) valeurs (PU) différentes (596,930 dollars/tonne pour 2976,151 tonnes et 454,930 dollars/tonne pour 2221,360 tonnes) ; par conséquent les éléments de calculs indiqués dans le tableau étant faux, le « montant en USD » de la colonne « facture redressée » est nécessairement faux, et par conséquent le montant « surfacturation » est également faux ;

–        Ligne 4 (N° facture S1723734), colonnes « Q » : le montant indiqué (4134,51) ne correspond pas au montant figurant sur le document source (facture VITOL du 31/08/2017 ; le bon montant est 4134,511 + 182,94 = 4317,447) ; par conséquent le montant « facture redressée » est faux ;

LXXX. Au vu de ces erreurs, seule la somme de 63.000 USD figurant dans le tableau appelle une réponse de notre part. Après lecture de la facture concernée, il s’avère qu’elle contient une erreur typographique tenant à l’inversion des chiffres 9 et 2 dans le total de la facture (3792281,95 au lieu de 3729282,95). Il s’agit donc d’une erreur matérielle du fournisseur lors de l’établissement de la facture et non d’une « surfacturation ». La somme de 63.000 USD sera réclamée par le CSFPPP et déduit d’un prochain paiement. A ce jour, cette somme ne saurait être considérée comme un préjudice définitif au détriment de l’Etat.

LXXXI. En toute hypothèse, le paiement de 63.000 USD n’a pas été effectué par l’Etat mais par les marketers, et il n’a pas bénéficié directement au Coordonnateur, par conséquent aucune base juridique ne permet de lui réclamer le remboursement de cette somme.

LXXXII. La recommandation n°11 enjoignant à M. Francis Sossah ADJAKLY de rembourser la somme de 94.277.091 francs correspondant aux surfacturations est sans fondement.

10.    Situation des surestaries et des coûts logistiques (page 19, paragraphes 4.1.5.2 et 4.1.5.3)

LXXXIII. Tous les contrats signés avec les fournisseurs stipulent que les surestaries (sommes dues par le locataire d’un navire pour le dépassement du temps de location initialement convenu) et les pertes liées au coulage (pertes de marchandise en cours de transport ou de transfert) sont à la charge des fournisseurs. Cette clause a toujours été respectée

LXXXIV. La recommandation n°12 invitant le Coordonnateur à veiller à la stricte application des clauses contractuelles relatives aux surestaries est donc superflue

LXXXV. En revanche, comme cela a été expliqué aux auditeurs qui, étrangement, ne le mentionnent pas dans leur rapport provisoire, les fournisseurs ont dû faire face à des coûts supplémentaires imprévisibles liés à des dysfonctionnements au niveau des capacités de stockage de la STSL17. Ces coûts exceptionnels sont tantôt qualifiés de « surestaries »18, tantôt qualifiés de « coûts logistiques »19.

LXXXVI.      Après négociation avec les fournisseurs, la responsabilité de ces coûts incombant à la STSL, donc à l’Etat, la décision politique a été prise de ne pas laisser ces coûts à la charge des fournisseurs, afin de ne pas mettre en péril le système d’approvisionnement en place. Par conséquent, ces charges ont été incluses dans le mécanisme d’ajustement des prix, ce qui se traduit par la ligne n°4 de la structure des prix (“Surestaries occasionnées par STSL”).

LXXXVII. En pratique, les dysfonctionnements liés à la STSL font systématiquement l’objet de signalements par les fournisseurs et information et approbation de l’autorité politique avant d’être inclus dans leurs factures.

LXXXVIII. La recommandation n°13 invitant le Coordonnateur à exiger des fournisseurs les documents attestant de la naissance des surestaries imputables à l’Etat est superflue.

LXXXIX. La prise en charge des dysfonctionnements de la STSL par l’Etat est une décision politique dont les membres du CSFPPP n’ont été que les exécutants. Il n’appartient pas au Coordonnateur du CSFPPP de juger du bienfondé de cette décision, n’y de voir sa responsabilité personnelle recherchée pour son exécution.

XC. En toute hypothèse les sommes payées aux fournisseurs au titre de ces dysfonctionnements ne nous ont pas personnellement bénéficié. Par conséquent aucune base juridique ne peut fonder une demande de remboursement de ces sommes à l’Etat par le CSFPPP ou ses membres.

XCI. Les recommandations n°14 et 15 exigeant le remboursement par M. Francis Sossah ADJAKLY de 885.571.555 francs et 7.376.510.755 francs correspondant aux surestaries et aux coûts logistiques supplémentaires imputables à la STSL procèdent d’une hérésie juridique.

A suivre……

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